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Rencontres et colloques

Assises de la recherche en sciences humaines et sociales sur la greffe d’organes

Les 25 et 26 avril, de 8h30 à 18h à l'Université Paris Diderot

Par: Espace éthique/IDF /

Publié le : 04 Avril 2017

8h30 - 18h
UFR de médecine - site Bichat
Salle des thèses - niveau -1
16 rue Henri Huchard 75018 PARIS

Programme complet via le le document à droite de cette page

Modalité d'inscription

Assises de la recherche en sciences humaines et sociales sur la greffe d’organes - Argumentaire

La greffe d’organes est une thérapeutique contemporaine dont l’efficacité permet à de nombreuses personnes de vivre alors qu’elles étaient condamnées et à de nombreuses autres de retourner à une vie personnelle, familiale, professionnelle satisfaisante alors qu’elles étaient très limitées par leur maladie.
Pour autant, elle suscite de nombreux conflits de valeurs et débats éthiques. Comme l’écrit le sociologue Christian Baudelot :
« la greffe brouille les frontières entre la vie et la mort en prélevant des organes vivants chez des morts pour remplacer des organes morts chez des vivants ; elle mutile des corps sains pour régénérer des corps malades ; elle introduit l’autre au plus profond du soi ; elle remet en question la définition de la mort, entendue traditionnellement comme l’arrêt du coeur et du souffle ; elle contraint le corps médical à enfreindre l’un des principes sacrés de son éthique professionnelle, le primum non nocere ».
Les questions concernent en premier lieu la procuration des organes chez les donneurs. En effet, le prélèvement d’organes suppose de porter atteinte à l’intégrité physique d’une personne vivante (don entre vifs) ou bien du corps d’une personne décédée (en mort cérébrale), et cela interroge les façons de procurer suffisamment d’organes dans des conditions éthiques satisfaisantes.
Pour le don en mort cérébrale, la question la plus discutée est celle de la place du consentement de la personne ou de ses proches et du conflit entre la solidarité avec les malades et le respect de la volonté de la personne décédée.
Pour le don entre vivants qui comporte des risques pour le donneur, la question principale est celle du conflit entre l’obligation de ne pas nuire et l’appréciation de la balance risques-bénéfices : comment évaluer l’équilibre entre le risque pesant sur le donneur et le bénéfice pour le receveur ? Là encore, plusieurs valeurs, toutes légitimes, entrent en conflit : la solidarité (avec un proche, mais plus largement aves l’ensemble des malades), la protection du donneur (on veut s’assurer du consentement et du niveau de risque acceptable), et son autonomie (il doit pouvoir décider pour lui même).

Du côté des receveurs, les questions les plus souvent citées sont celles de la dette (vis-à-vis du donneur) et de l’identité individuelle. En effet, comme le montre l’anthropologue David Le Breton, les témoignages des malades montrent un sentiment de dette vis-à-vis du donneur. C’est que dans les sociétés humaines, le don appelle une réciprocité qui garantit l’égale dignité des partenaires de l’échange. Du coup, comment rendre, comment participer au cycle du don quand le donneur est mort ?
Et du côté de l’identité, les questions sont aussi nombreuses, car il s’agit d’accepter un « corps étranger » en soi. D’autres questions tout aussi essentielles se posent, autour des problématiques d’accès et notamment d’accès à l’emploi, au logement ou encore à l’assurance et à l’emprunt, particulièrement en post-greffe. Ces questions concernent les inégalités sociales de santé et la philosophie politique.
Enfin, avec les progrès de la transplantation, la « médecine de transplantation », initialement spécifiquement chirurgicale évolue et devient de plus en plus interdisciplinaire, associant de nombreuses spécialités autour de prises en charges complexes. Cette évolution multiple ouvre de nombreuses questions, de l’innovation chirurgicale et technique aux débats sociaux et éthiques jusqu’à l’organisation administrative de la procuration et de la distribution des organes. Ces questions portent sur la façon dont se constitue ou non une nouvelle forme d’identité professionnelle autour de la greffe. Elles interrogent aussi la place des équipes dans la décision de transplantation (notamment au regard d’une gestion centralisée des listes d’attente et des prélèvements) tout comme la place de la décision du malade lui même et de ses proches (particulièrement dans le don entre vivants).

L’objectif des Assises de la Recherche en Sciences Humaines et sociales, co-organisées par le Programme Interdisciplinaire USPC "La personne en médecine" et l'Espace de Recherche et d'Information sur la greffe hépatique, est de faire le point sur l’état de la recherche sur ces questions en conviant les chercheurs en médecine, en sciences humaines et sociales, comme les patients et leurs représentants, à participer aux sessions ouvertes autour des quatre thèmes suivants.