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Forum #1 : L'engagement a-t-il des limites ? (17 février 2016)

Le 1er forum « Valeurs de la République, du soin et de l’accompagnement » (VRSA) s’est tenu le mercredi 17 février à la mairie du 4ème arrondissement de Paris sur la thématique de l’engagement. Bénéficiant des interventions de Serge Guérin, sociologue, professeur à l’INSEEC Paris et de Céline Louvet, Directrice d’un établissement médico-social à l’APF Paris, complétées par les interviews filmés de plusieurs professionnels de santé et les échanges avec la salle, ce premier forum avait pour objectif de questionner les limites de l’engagement.

Publié le : 11 Février 2016

L’image du professionnel dévoué et peu regardant de ses intérêts colle à la peau des soignants et, plus généralement, de tous les serviteurs de l’intérêt public. L’« engagement » ainsi promu, parfois héroïsé, semble pourtant se heurter à des limites évidentes : celles des institutions et de leurs contraintes financières, celles de la vie privée, des conflits de valeurs… de sorte que l’on appelle souvent en renfort de l’« engagement professionnel » un « engagement citoyen » aux contours bien flous. Mais jusqu’où sommes-nous engagés pour le bien de la cité ? Entre désengagement et enrôlement, comment situer la juste place d’un engagement réfléchi et réaliste ?

Le forum a été introduit par Christophe Girard (Maire du 4e arrondissement de Paris) et conclu par Paul-Loup Weil-Dubuc (philosophe). Céline Louvet (Directrice d’équipement médico-social, APF, Paris) et Serge Guérin (sociologue, professeur à l’INSEEC, Paris) sont intervenus entant que grands témoins.

Le forum #1 en vidéo : "L'engagement a-t-il des limites ?"

Ce que l’on retient des discussions

Les échanges ont soulevé plusieurs problématiques relatives à l’engagement :

  • Les conflits d’engagement : en prenant l’exemple du soignant dont les engagements professionnels risquent d’étouffer les engagements personnels et familiaux, Céline Louvet a mis en évidence les multiples conflits auxquels se heurtent les professionnels du soin. A cela s’ajoute qu’en s’engageant soi-même, on peut engager un autre que soi sans le vouloir ni le savoir. L’engagement impose, pour être tenu jusqu’à son terme, une lucidité, une discipline et une clairvoyance face aux parcours sinueux de l’accompagnement d’une personne vulnérable.
  • Les risques de l’engagement : quel regard poser, quel soutien apporter à ce professionnel qui délaisse sa famille sur son temps personnel pour accompagner un usager ou à cette auxiliaire de vie ayant des enfants en bas âge qui doit remplacer sa collègue en arrêt ? « En mettant la barre trop haut », l’engagement risque aussi de susciter l’illusion de sa permanence. Les missions de management invite à réguler « les petits arrangements » auxquels mène l’engagement.

  • Le sens de l’engagement : comment accompagner l’engagement pour que celui-ci soit constructif, qu’il ne s’essouffle pas et qu’il ne perde pas son sens ? L’engagement, pour survivre aux vicissitudes, suppose une convergence entre les valeurs qui le sous-tendent et le contexte culturel plus large dans lequel il s’exerce. Sans quoi il devient inévitablement enrôlement. Une réponse pourrait être trouvée dans les formations des professionnels qui devraient aborder la notion d’engagement.

Les discussions ont souligné le fait que l’engagement se pose de la même manière chez tous les professionnels du soin et de l’accompagnement quels que soient le salaire, le niveau d’études, etc. Serge Guérin a rappelé qu’une personne ne peut pas être engagée à 100 %, « corps et âme », et doit pouvoir cultiver plusieurs engagements. Ne peut-on considérer à cet égard que vivre suppose de s’engager en un sens plus profond de sorte que le suicide se présente comme la forme la plus radicale du désengagement ? Pour éclairer les échanges, Serge Guérin a également distingué le militantisme qui ne s’intéresse qu’au but de l’engagement d’une approche éthique plus attentive aux conditions de son expression et de son cheminement.

Des participants dans la salle se sont alors interrogés sur le choix du métier comme source indiscutable de l’engagement : « Choisir un métier du soin suppose-t-il nécessairement d’être engagé ? ».Le fait que ces métiers soient ancrés dans la relation à l’autre nous laisse penser qu’ils demandent effectivement un engagement supérieur. Dans un contexte culturel qui semble propice au désengagement ou aux engagements éphémères, comment encore trouver des raisons et la force de s’engager ?

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Contributions écrites au Forum
  • Encadrer l’engagement : des limites subies aux limites réfléchies
    Catherine de Brabois, Infirmière coordinatrice en SSIAD, doctorante, Espace éthique/IDF, université Paris Sud
    S’inspirant de son expérience comme infirmière à domicile, Catherine de Brabois pose simultanément la question de savoir jusqu’où l’engagement peut aller et jusqu’où il doit aller. Dans un contexte socioéconomique qui ne légitime plus que les activités tarifables et valorise surtout l’autonomie du patient, comment donner la possibilité au soignant de s’investir dans son activité de soin par-delà le simple geste dicté par le protocole ?
  • La posture de soignant-citoyen doit être une attitude éthique
    Domitille Gueneau-Peureux, Infirmière spécialiste clinique en Equipe mobile d'accompagnement et de soins palliatifs.
    Se posant la question de ses engagements moraux en tant que citoyenne et soignante, Domitille Gueneau-Peureux, met en valeur les imprécisions préjudiciables de la loi Claeys-Léonetti, rendant l’engagement moral du soignant à la fois majeur et périlleux.
  • Du désir subjectif à la concertation possible

    Fernando de Amorim, Psychothérapeute, Psychanalyste, fondateur de la Consultation Publique de Psychanalyse (9ème arrondissement de Paris).
    Fernando de Amorim est le fondateur d’une institution, la Consultation Publique de Psychanalyse, où des étudiants en psychologie donnent des consultations pouvant être gratuites aux personnes en détresse psychique et dont les moyens sont souvent trop bas pour accéder à de tels soins dans des structures traditionnelles. S’inspirant de cette expérience il écrit un texte qui dit son attachement à la République Française et qui nous indique la possibilité de mettre en place des institutions solidaires au sein des lieux de soin.

  • Une manifestation de notre engagement professionnel envers les personnes aidées
    Manon Pagano, Gestionnaire de Cas, MAIA
    On peut discerner deux niveaux de l’engagement. Le premier est celui du professionnalisme, il pousse à mener un savoir-faire et un soin vers une qualité toujours plus grande. Le deuxième est celui de l’engagement de la personne au-delà des contraintes juridiques et économiques ; il inscrit pleinement le soin dans une réponse à la vulnérabilité. La frontière entre ces deux niveaux est perméable, ils s’entremêlent et aident le soignant à mieux répondre à la question du sens qui anime sa pratique.

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Valeurs de la République, du soin et de l'accompagnement