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Les réflexions et questionnements qui suivent ont été élaborés par un groupe de médecins impliqués dans la greffe de moelle, greffeurs pour la majorité d'entre eux, au cours de trois réunions préparatoires au colloque : Aspects et enjeux éthiques de la greffe de moelle en pédiatrie. Elles prennent leur source dans l'expérience quotidienne des participants et ont été confrontées à des textes juridiques de référence
Par: Michel Duval, Service d’hémato-oncologie, hôpital Sainte-Justine, Montréal /
Publié le : 22 Juillet 2003
Les réflexions et questionnements qui suivent ont été élaborés par un groupe de médecins impliqués dans la greffe de moelle, greffeurs pour la majorité d'entre eux, au cours de trois réunions préparatoires au colloque : Aspects et enjeux éthiques de la greffe de moelle en pédiatrie.
Elles prennent leur source dans l'expérience quotidienne des participants et ont été confrontées à des textes juridiques de référence (de 1 à 3).
Cette confrontation a retrouvé dans la majorité des cas une grande concordance.
Texte extrait de La Lettre de l'Espace éthique n°15-16-17-18, 2002. Ce numéro de la Lettre est disponible en intégralité en suivant le lien situé à la droite de la page.
Ont participé à cette réflexion collective :
Hélène Espérou (Paris), Gérard Michel (Marseille), Françoise Méchinaud (Nantes), Jean Michon (Comité des experts, Paris), Jean-Hugues Dalle (Lille), Michel Duval (Montréal). Les étapes écrites de cette réflexion ont été relues par Pierre Quartier (Paris), Judith Landman (Paris) et Anne-Sophie Carret (Montréal).
Les participants ont exprimé le besoin d’un document commun qui pourrait être distribué aux familles. Nous pensons tous que la production de ce document constitue un but indispensable et réalisable.
Nous ressentons vivement le besoin éthique d’un tel document. Les avancées législatives récentes, reflet des besoins des familles et des patients, ne sont pas étrangères à cette prise de conscience. Ainsi, paradoxalement, on constate plus d’avancées :
- pour le donneur que pour le receveur ! En effet le donneur reçoit un document écrit, puis exprime sa volonté auprès de tiers (Tribunal de grande instance, puis comité d’experts) ;
- pour la simple transfusion que pour la greffe ! En effet, pour la transfusion une information écrite est désormais obligatoire ;
- pour la recherche clinique que pour les procédures faisant l'objet d'un consensus ! Les documents d’information pour les consentements éclairés pour la recherche sont extrêmement précis et validés par un comité indépendant.
Ce besoin éthique se doublera probablement à terme d'un besoin légal : " l’honnêteté nous le commande, et la société nous le demande ", comme le souligne l'un d'entre nous. Par exemple, on peut penser que ce type de document sera exigé pour les futures accréditations.
Enfin, des informations écrites sur la greffe de moelle sont désormais accessibles aux familles ayant accès à internet. Dans notre expérience, cette information peut être délétère, car les informations disponibles, même quand elles sont de qualité, sont souvent mal hiérarchisées. Un point " de détail " ou une complication rarissime peut ainsi induire une angoisse que la famille n’osera parfois pas aborder avec le greffeur. Il est donc préférable que la source d’information principale soit connue du greffeur, permettant ainsi des échanges ultérieurs avec la famille adaptés à chaque situation.
La validation de ce document écrit par des associations de patients et les sociétés savantes nous paraissent absolument indispensables.
Ce document écrit viendrait en complément de l'information orale. Son but n'est pas de remplacer un entretien. Cette exigence se retrouve dans les recommandations de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES).
Seule une information orale permet d'adapter la communication à la famille, de délivrer une information progressive si nécessaire, de hiérarchiser les informations, d'insister sur les avantages attendus de la greffe, de vérifier enfin que l'information a été correctement transmise.
Il faudra donc que le document insiste sur le fait que le risque dépend de l’état de santé du receveur (indication de la greffe et antécédents, notamment thérapeutiques) et de la comptabilité avec le donneur. Cela permettra de laisser à la famille un espace de liberté qui lui permette d’élaborer sa réflexion, et de réserver la communication sur l’intensité du risque à l’échange oral.
Notre pratique est très diverse. La solution qui nous semble probablement la plus souvent souhaitable comprend :
- un entretien avec la famille et le receveur sur la greffe en général, au terme duquel le document serait remis. Un entretien en trois temps semble le plus souvent nécessaire : parents et receveur, parents seuls après avoir fait sortir l’enfant (en lui disant que les adultes ont souvent des questions d’adultes à poser), puis, s’il le désire l’enfant seul. À cette occasion, le problème du donneur ne devrait être abordé que très brièvement ;
- un entretien avec le donneur et la famille sans la présence du receveur (même pas derrière la porte), afin de centrer la problématique sur le donneur et valoriser son rôle. Un entretien avec le donneur seul devrait lui être systématiquement proposé. De même, il est préférable que lorsque se tient la réunion du comité d’experts, le receveur ne soit pas présent.
Le document serait donné aux familles à l’issue de la première consultation, donc après la première explication orale de la greffe, de son principe, de ses risques et de sa justification. Dans certaines situations, le médecin pourrait sentir que le moment n’est pas encore venu, et repousser la remise à l'issue d'un second entretien.
La recommandation de l'ANAES, issue des arrêts de la Cour de cassation et du Conseil d'État selon laquelle " l'information doit préciser les risques graves, y compris exceptionnels, c'est à dire ceux qui mettent en jeu le pronostic vital ou altèrent une fonction vitale " signifie-t-elle qu'il faut exposer une liste exhaustive de tous les risques ? Dans le contexte très complexe de la greffe de moelle, où " tout peut arriver ", il paraît impossible d’appliquer à la lettre une telle recommandation, cela pour plusieurs raisons. D’une part, par sa taille et sa complexité, la liste exhaustive des complications exceptionnelles de la greffe est susceptible de faire passer au second plan l’essentiel de l’information : le bénéfice potentiel a été pesé par l’équipe médicale et il dépasse les risques encourus. D’autre part, cet énoncé peut inciter la famille à surestimer le risque de la greffe : chacun de ces risques est par définition exceptionnel et la somme de risques exceptionnels peut demeurer minime. Une telle addition d’informations écrites pourrait être vécue par les parents comme une sorte de décharge de responsabilité de le part du médecin, même si celui-ci s’en défend avec conviction. Dans l’expérience des greffeurs, il n'est pas rare de rencontrer du " jamais vu ". Une telle liste ne saurait donc par définition être exhaustive et donc ne serait finalement que trompeuse.
L'arrêt du Conseil d'État du 5 janvier 2000 est précédé des conclusions du Commissaire du Gouvernement (dont le but est d'éclairer l'arrêt et de le préciser) : " Le médecin n'est nullement tenu de procéder à une énumération exhaustive des types d'accidents constatés, quelle que soit leur fréquence. En effet, ce n'est pas d'un tel inventaire sinistre que le patient a besoin pour prendre sa décision. Il suffit qu'il obtienne une réponse honnête à une question simple qu'il se pose nécessairement : quel est l'ordre de grandeur du risque de décès ou d'invalidité que je cours en acceptant l'opération ? "
C’est pourquoi il semble à notre groupe de travail que l’existence de risques exceptionnels doit être indiquée à la famille, sans détailler la liste de ces risques. Seuls nous paraissent devoir être détaillés :
- les risques principaux (par leur degré de certitude, comme l’infertilité) ou leur gravité (comme l’existence générale d’un risque vital) ;
- la physiopathologie générale, afin de permettre à la famille de comprendre et de suivre la survenue ultérieure éventuelle d’un risque exceptionnel.
La mention de l’existence de risques exceptionnels que l’on ne peut tous détailler sera accompagnée de l’information précisant que la surveillance clinique et biologique mise en place sera à même de dépister précocement l’apparition des manifestations afin de prendre les mesures thérapeutiques nécessaires. De même, les risques pour la fertilité doivent faire l'objet d'une information sur les moyens actuels de préservation (congélation de sperme ou d'ovaires selon l'âge, le sexe et les antécédents).
Enfin il faudra bien insister au cours de l’entretien sur le fait que si la greffe est proposée, c’est que le greffeur est certain que les risques de ne pas greffer sont supérieurs aux risques de greffer, que le pour et le contre ont été mûrement pesés et qu’il s’agit d’une décision du médecin qui engage sa responsabilité pleine et entière. Ce point devrait d’ailleurs être abordé par écrit dans le document.
À cette occasion pourrait être abordé par ailleurs le processus de décision, notamment dans les indications difficiles : discussion approfondie entre les membres de l’équipe. Deux situations peuvent se présenter. Soit la greffe est indiquée en accord avec un protocole consensuel (cas par exemple de la majorité des leucémies) ayant été élaboré et approuvé par des dizaines de spécialistes, soit elle a été discutée dans une réunion entre équipes de greffeurs. En effet de nombreuses familles nous paraissent inquiètes de ce point, même si peu osent l’aborder aux premiers entretiens, et très rares sont celles qui demandent un véritable deuxième avis.
Même en ne détaillant pas les risques exceptionnels, dans le cadre de la greffe de moelle il paraît impossible de respecter la recommandation de l'ANAES selon laquelle "le document remis au patient ne devrait pas excéder quatre pages ". Mais la réflexion devra sûrement porter sur la façon dont on peut aider la famille à " naviguer " à sa convenance dans un gros document : index clair ? Hypertexte sur CD-ROM ? Hypertexte sur site internet accessible à partir du service ?
L’intérêt de disposer de plusieurs documents serait d’adapter étroitement l’information à chaque situation, et notamment de délivrer une information par écrit relative à l’importance des différents risques. À l’inverse, pour des raisons pratiques un consensus se dégage en faveur d’un seul document, mais aussi pour réserver l’information sur l’intensité des risques à la communication orale. L’intensité de risque constitue par ailleurs une information particulièrement difficile à cerner : quand une complication survient, cela revient à " cent pour cent pour le patient ", même si elle est exceptionnelle. Certaines greffes à très haut risque se déroulent sans aucun problème, alors que certaines greffes " faciles " se passent mal. Autant l’information sur l’existence d'un risque est de l'ordre du fait, autant l’information sur le niveau de chaque risque a une forte coloration culturelle, psychologique ou spirituelle. Elle paraît devoir être étroitement adaptée à chaque famille, au fil de l’entretien, en tenant compte des réactions (verbales ou non) de la famille.
Le document écrit n'aurait qu'une fonction strictement informative, et n'aurait pas vocation à recevoir la signature du patient. Les juristes sont d'accord avec cette position aux motifs suivants :
- la pratique médicale ne peut être guidée par le souci d'une éventuelle procédure judiciaire ultérieure, " on transformerait une obligation du médecin (celle d'informer) en une obligation du patient puisque l'information lui serait donnée moins pour faire des choix que pour permettre au médecin de disposer d'une preuve qui lui parait nécessaire " ;
- il n'y a aucune obligation légale ou réglementaire à faire signer un tel document, sauf cas précis : études génétiques, recherche biomédicale, assistance à la procréation, IVG, prélèvement d'organe sur donneur vivant, intervention chirurgicale sur un mineur ;
- une telle signature peut être anxiogène pour la famille et détériorer la relation en étant ressentie comme une décharge de responsabilité de la part du médecin ;
- elle fige le consentement, qui, en droit, doit être révocable à tout moment ;
- elle ne protège pas le médecin, car une enquête pourrait démontrer l'insuffisance d'information, même si l'attestation contraire signée existe. Le consentement écrit n'a pas de valeur juridique absolue. En pratique, en cas de contestation le dossier médical est le support privilégié qui servira à faire apparaître si une information correcte a été donnée. C'est pourquoi il faut y écrire les résumés d'entretien qu'on a pu avoir avec la famille. Ces résumés représentent par ailleurs un support précieux pour la communication au sein de l'équipe soignante.
Même si la grande majorité des familles veulent " tout savoir " sur la greffe, il arrive parfois que pour des raisons psychologiques évidentes elles occultent une partie de l’information qui leur est transmise. Ceci soulève le problème du " droit de ne pas savoir ". L’information étant actuellement orale, les familles ont la liberté de ne pas entendre. Si elle était écrite, auraient-elles la liberté de ne pas la lire ? Dans l’expérience des participants on constate ainsi plusieurs cas d’occultation d’une information écrite. Le risque de forcer certaines familles à regarder en face ce qu’elles ne désirent pas savoir à ce moment-là paraît donc faible (mais cependant réel). La présentation du document devra sans doute intégrer cet impératif, en permettant aux familles de sauter éventuellement certains passages à la première lecture.
L’information sur ce thème (centre post-greffe, isolements, précautions alimentaires, et d’hygiène, etc.) doit être très détaillée dès avant la greffe. La pratique habituelle des centres consiste à ce que le médecin signale ces précautions puis que le cadre infirmier les détaille.
Ces précautions pourraient figurer sur le document, en mentionnant qu’elles sont adaptées à chaque cas particulier et évolutives au fil du temps. Devraient figurer aussi les précautions qu’il ne faut pas prendre (comme de retirer les moquettes, ce à quoi ont été confrontés plusieurs d'entre nous !).
Nous avons tous rencontré avec certaines familles des difficultés liées à une distance linguistique et culturelle. Il n’est pas sûr que l’existence d’un document permette de résoudre, même en partie, ces difficultés. Néanmoins, la remise de ce document est un échange qui peut être perçu comme une volonté d’informer complétement et franchement. À défaut d’informer réellement, il permettrait au moins de contribuer à l’instauration d’une relation de confiance. Il contribuerait au rapprochement des points de vue, par exemple par le truchement d’un tiers capable de le lire et de le commenter dans la langue de la famille. Il ne nous paraît donc pas utile de disposer d’un document traduit dans les principales langues représentées.
Pour les entretiens, l’interprète est nécessaire si l'un des deux parents ne comprend pas le français. Il ne résout pas tous les problèmes, car la différence de langue est souvent accompagnée d’une différence de culture. Ce fossé culturel est d'ailleurs parfois rencontré avec des familles d’expression française. Par ailleurs, l’intervention des interprètes pose des problèmes spécifiques :
- leur rôle est de communiquer aux uns la parole des autres et il faut leur rappeler qu’ils sont tenus au secret médical (à la suite d’une réunion du comité d’experts, il est arrivé qu’un interprète rapporte aux parents ce que l’enfant avait dit sous le sceau du secret) ;
- ils sont rarement préparés à ce type d’entretien, à ses difficultés techniques et émotionnelles : il existe clairement un danger psychologique pour l’interprète, ainsi que le risque qu'il prenne une initiative délétère pour la famille.
La culture aussi est évolutive, et particulièrement celle des médecins : ainsi, nous avons tous noté que " nous en disons de plus en plus "…
L’évaluation de l’information transmise aux parents paraît absolument indispensable, bien qu’il semble que peu d’équipes de greffes la pratiquent.
Nous proposons, à partir de l'expérience de l'équipe de Nantes, d'utiliser une " check-list " à signer par le médecin et non par les parents :
- elle servirait de canevas pour un second entretien, pour vérifier que l’information a bien été délivrée, au moins dans ses grandes lignes ;
- le médecin qui la réalise pourrait être ou non celui qui a réalisé le premier entretien ;
- les questions seraient du type " tel aspect a-t-il bien été abordé ? ", sans aller dans les détails, afin de préserver la possibilité pour la famille d’une écoute " sélective " ;
- la famille serait invitée à poser à chaque chapitre abordé les questions qu’elle désire ;
- cette check-list pourrait servir de canevas pour le futur document écrit.
La place des infirmières est importante car elles sont en contact permanent avec l'enfant et la famille. Cette place n'est pas formellement délimitée, elle dépend beaucoup de l'infirmière, de son expérience professionnelle et de sa personnalité.
Nous estimons normal que les résultats des examens complémentaires simples (numération-formule sanguine, etc.) soient communiqués par l'infirmière. C'est d'ailleurs la règle en vigueur dans de nombreux services. De même l'information concernant de mauvaises nouvelles ne doit pas revenir à l'infirmière mais au médecin. Ainsi, si un résultat habituellement donné par l'infirmière recouvre une mauvaise nouvelle, elle demande alors au médecin d'annoncer et d'expliquer ce résultat.
Un document écrit et l'utilisation d'une " check-list " permettraient une traçabilité de l’information, et ainsi de savoir ce qui a été dit et ce qui ne l’a pas été, notamment pour favoriser la communication entre les différents médecins et soignants de l’équipe de greffe.
Il s’agit d’un problème fréquemment rencontré par les équipes de greffe. Selon les équipes, tout ou partie de l’information sur la greffe a déjà été communiquée par l’équipe qui réfère le patient.
Du point de vue des greffeurs, les problèmes sont les suivants :
- le risque que la greffe soit vécue par la famille comme un " miracle ", les difficultés n’ayant généralement pas été abordées (il est difficile de demander à une personne qui ne réalisera pas la greffe de détailler les différents risques…) ;
- la communication doit être adaptée à chaque famille et notamment à l’information dont elle dispose déjà, aspect qui est souvent flou ;
- la nécessité de créer une nouvelle alliance thérapeutique avec une nouvelle équipe.
L’existence d’un document commun pour les familles pourrait résoudre une partie de ces problèmes. Le document ne serait pas remis par l’équipe qui réfère le patient, mais permettrait à cette équipe de savoir ce qui est dit à la famille.
Faut-il rencontrer en entretien les familles pour lesquelles la greffe n’est pas encore certaine ou faut-il attendre l’indication de greffe ? Aucune attitude systématique ne peut être préconisée. Pour certaines familles, il est utile d’avoir rencontré le greffeur même si la greffe n’est jamais réalisée. En effet, elles peuvent avoir besoin de temps pour arriver à envisager la greffe et pour s’adapter à une nouvelle équipe. Par ailleurs, si la greffe ne se fait pas, cette mesure démontrera que tout a été fait pour préserver les chances, et l’information équilibrée donnée sur la greffe et ses risques permettra à la famille d’éviter le concept de " greffe-miracle ".
Proposer un entretien particulier à l'adolescent paraît constituer une solution. L’existence d’un document écrit permettrait à l’adolescent et à sa famille de disposer d’un document commun autour duquel une information orale personnalisée aura été transmise.
Le fait que ce document soit accessible à l’adolescent rendra sa rédaction particulièrement difficile. Il faut par exemple éviter que l’enfant ou l’adolescent apprenne par ce document le risque sur la fertilité, et non au cours d’un entretien attentif et empathique.
Un livre adapté à l’enfant plus jeune serait également très utile et pourrait représenter une étape ultérieure.
La fratrie est en pratique rarement vue par les médecins. Bien que nous pensons qu'il y a nécessité d'une prise en charge spécifique, nous n'avons pas d'idée très précise des besoins concrets.
Les recommandations de l’ANAES demandent qu’une " synthèse des données médicales soit effectuée pour le patient par un médecin unique ". Cela peut se comprendre (ou non) comme la nécessité que le même médecin (dit référent) établisse la synthèse pour une famille donnée.
La pratique du médecin référent est assez variable d’une équipe de greffe à l’autre. Dans tous les cas, quand l’enfant est suivi en consultation, la situation est simple puisqu’un consultant, toujours le même, fait la synthèse à l’occasion des consultations.
En revanche, pendant les hospitalisations cette synthèse est réalisée soit par le médecin en charge à ce moment de l’unité de greffe, soit par le médecin dit référent de l’enfant. Aucune équipe de greffe ne paraît adopter une pratique déterminée en cette matière. Certaines instituent de façon explicite un référent dès l’arrivée du patient, mais l’information synthétique peut être assez souvent délivrée par un autre médecin au gré des responsabilités et des disponibilités. D’autres acceptent qu’un médecin référent implicite intervienne ou non selon les familles.
Il nous semble que pendant l’hospitalisation une relative souplesse soit de mise dans la notion de médecin référent, pour permettre à la famille de choisir puis de changer de médecin référent au fil du temps. Certaines familles préfèrent un autre référent que celui qui leur a annoncé les mauvaises nouvelles, c’est-à-dire le diagnostic ou les risques de greffe, ou peuvent éprouver des affinités culturelles ou psychologiques avec tel médecin autre celui que l’équipe aurait désigné. Il importe de se donner les moyens de délivrance d’une information synthétique de qualité dans un climat de confiance réciproque, même en l’absence du médecin référent quand l’urgence l’exige.
Il faut cependant souligner qu’une telle attitude souple expose l’équipe médicale au risque de ne pas assez informer une famille discrète qui ne réclamerait pas d’informations, a fortiori les familles qui " fuient " les médecins pour des motifs variés dont le déni ou la pénibilité des informations à recevoir.
1. Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé. " Informations des patients - Recommandations destinées aux médecins ", Rapport, mars 2000. Document téléchargeable sur www.anaes.fr, rubrique " publications ".
2. L'information médicale du patient, règles et recommandations, Paris, AP-HP/Doin, 2000.
3. Le relation médecin-malade face aux exigences de l'information, Paris, AP-HP/Doin, 1999.