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Fin de vie en hématologie
Par: Sandra Malak, Hématologue - Pôle d'Oncologie et de Médecine Nucléaire, Hôpital Saint Antoine /
Publié le : 04 Février 2015
Tensions éthiques
La prise en charge des hémopathies malignes a connu des avancées majeures, avec des innovations thérapeutiques qui ont révolutionné nombre de pathologies que les hématologues prennent en charge. Cependant, dans encore de trop nombreux cas, des maladies se révèlent réfractaires aux traitements et nous devons alors trouver le moyen d’accompagner nos patients dans une fin de vie la plus sereine possible. Il existe plusieurs spécificités, propres à notre spécialité et à ces situations, qui peuvent être source de tensions éthiques importantes, en particulier dans les situations de fin de vie :
- l’imprévisibilité des évolutions rendant difficile toute anticipation ;
- la perspective, bien que rare, d’une curabilité à des stades très avancées et parfois même après plusieurs lignes de traitements;
- la rapidité évolutive ne laissant, souvent, que peu de place à l’adaptation ;
- la prééminence donnée à la recherche clinique et les nombreuses innovations thérapeutiques ;
- une proximité importante entre les équipes et des patients souvent jeunes, accompagnés quotidiennement pendant des hospitalisations prolongées et difficiles ;
- une forte iatrogénie liée à des thérapeutiques souvent lourdes et intensives, où le « prix à payer » est tel que l’espoir suscité supporte difficilement la déception ;
- le recours à des transfusions, y compris à des stades avancés, vécus comme vecteur de vie.
Ainsi, une personne qui était à un stade palliatif de sa maladie sans réelle ressource thérapeutique aura sa vie transformée par l’arrivée d’un nouveau traitement qui aboutira à une rémission complète et lui permettra de vivre encore de nombreuses années. A contrario, une autre personne que nous pensions sortie d’affaire, décédera brutalement d’une infection, bien qu’en rémission complète de son hémopathie.
Nous sommes parfois tentés de faire preuve d’un certain triomphalisme médical, notamment devant les réelles guérisons que nous obtenons souvent et les avancées thérapeutiques enthousiasmantes. Ce qui nous amène parfois à nier et à repousser les évolutions défavorables, rendant encore plus difficile une juste anticipation et obérant toute possibilité d’adaptation. Autant de situations qui peuvent entraîner une réelle difficulté dans le désinvestissement thérapeutique, le risque étant alors que la relation soignant/patient soit dominée par un discours essentiellement thérapeutique, laissant de côté les enjeux propres à la personne, ses valeurs, ses projets de vie.
Une optimisation de la prise en charge des symptômes
De nombreuses études montrent que le recours aux soins palliatifs en hématologie est bien moindre et plus tardif que pour la prise en charge des autres maladies cancéreuses. Et pourtant, la littérature s’enrichit progressivement d’études qui démontrent que nos patients souffrent. Jusqu’ici, la forte iatrogénie induite par nos traitements était presque banalisée tant elle était vécue comme attendue et « normale ». Mais il est aussi montré que cette souffrance peut faire l’objet, au moins en partie, d’une prise en charge spécifique. Des expériences sont de plus en plus souvent rapportées de succès d’intégration d’une démarche palliative dans la pratique hématologique, y compris dans les secteurs de soins intensifs. L’objectif de cette collaboration est l’instauration d’une culture de la communication, une optimisation de la prise en charge des symptômes et au final un meilleur vécu par chacun de ces situations nécessairement difficiles mais non insolubles.
Consciente de ces difficultés, la Société française d’hématologie s’est dotée, il y a quelques années déjà, d’une commission d’éthique qui s’interroge, réfléchit, approfondit la réflexion et permet d’apporter un nouvel éclairage, notamment sur ces problématiques de fin de vie. Ainsi, loin de tout dogmatisme, c’est à travers un souci éthique, nourri d’humilité, enraciné dans la complexité du contexte et fondé sur la délibération, le soin et l’attention dans la relation à autrui que progressivement nous parviendrons à élaborer des projets de vie réellement centrés sur la personne, qui reste et demeure notre souci premier.