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L’aide médicale à mourir peut-elle être considérée comme un soin ?
"Dans une relation de soins palliatifs non médiée par la prescription/administration d’un traitement létal mais dans laquelle le patient sait qu’il peut y avoir accès, une relation de soin thérapeutique peut s’instaurer."
Par: Audrey Lebel, Médecin de Soins Palliatifs – Hôpital Saint Louis - APHP /
Publié le : 27 juin 2023
En tant que médecin de soins palliatifs, je suis confrontée à des patients qui se présentent à ma consultation en disant : « Docteur, je veux mourir ! ». Dans ces situations, je commence par analyser la situation médicale, évaluer l’espérance de vie du patient en face de moi, qui va souvent de quelques mois à quelques semaines, puis j’essaie enfin de comprendre ce qui sous-tend cette demande. Les motifs sont multiples, mais le plus souvent médiée par des symptômes non soulagés.
Durant ces entretiens, on parle de la vie et de la mort en général, puis de leur vie et de leur mort. Cela permet de découvrir qui ils sont et de cerner leurs objectifs quotidiens, les relations avec leurs proches, et l’ensemble des choses qu’ils souhaitent faire avant leur décès. Nous évaluons ensemble comment améliorer leur qualité de vie en fonction de leurs objectifs et ce dont ils ont besoin pour les réaliser. L’aspect principal de ces échanges est de replacer les patients au centre de leur prise en charge, de leur faire dire ce qu’ils veulent au-delà de la maladie car, comme l’indique Georges Canguilhem, « La frontière entre le normal et le pathologique est […] imprécise pour des individus multiples considérés simultanément mais elle est précise pour un seul et même individu considéré successivement. »
Dans la demande de mort exprimée par les patients que je rencontre, il y a la volonté de maitriser le lieu et le moment de leur décès. La peur de vivre des souffrances à l’approche de l’agonie, la peur de voir leurs proches les veiller. Même si mon expérience me fait dire que plus on s’approche du décès, plus l’être humain redouble d’énergie pour maintenir le dialogue avec ses proches, l’aide active à mourir semble nécessaire pour juguler l’angoisse de mort de tout un chacun.
L’aide active à mourir pourrait donc s’envisager chez un sujet ayant connaissance de sa maladie, de son pronostic, comme ultime acte d’autonomie décisionnelle : « Je sais que je vais mourir de ma maladie M, et je ne veux pas vivre les semaines/mois qui me restent à vivre. Je veux mourir ici et maintenant ».
Le soignant doit-il/peut-il être impliqué dans cette décision ? Le médecin peut-il le proposer ? Dès lors qu’un sujet meurt, toute relation de soin disparait puisqu’il faut deux sujets pour définir cette relation. Lorsque le geste de prescrire ou d’administrer un produit létal apparait, la relation devient faussée dans le prisme futur de la disparition du sujet.
L’aide active à mourir, définie comme un geste autonome et non réalisé par un soignant, ne nie ni la relation de soin, ni la vocation du soignant. Soigner et traiter n’étant pas synonymes mais complémentaires. Le soignant soigne et propose afin que le patient décide et se traite.
Dans une relation de soins palliatifs non médiée par la prescription/administration d’un traitement létal mais dans laquelle le patient sait qu’il peut y avoir accès, une relation de soin thérapeutique peut s’instaurer.
Dès lors, l’aide active à mourir ne peut être considérée comme un soin puisque non délivrée par un soignant, mais pourrait s’analyser comme un droit civique, si elle est votée comme tel, auquel chacun pourrait accéder sous certaines conditions, encadrées et définies par la loi et évaluées par le patient, lui-même accompagné par les soignants. Le patient restant in fine seul maitre de la prise du produit létal.
A propos de ce texte
Ce texte est tiré du document Fin(s) de vie : s’approprier les enjeux d’un débat publié en mars 2023 par l'Espace éthique/IDF dans le cadre du débat sur la fin de vie