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Reconnaître et préserver les capacités décisionnelles de la personne dans les maladies neurologiques dégénératives évolutive à impact cognitif
"La seule présence de troubles cognitifs ne permet pas de conclure à l’incapacité. Quand ces troubles sont légers, comme au début de la maladie d’Alzheimer, ils n’empêchent pas forcément de prendre des dispositions en connaissance de cause. Les troubles du comportement sont cependant aussi, bien sûr, à prendre en compte."
Par: Laurence Hugonot-Diener, Psychogériatre, Hôpital Broca, AP-HP, consultation mémoire CMRR Paris-Sud et à Mémorys (réseau Alzheimer du sud Parisien) /
Publié le : 05 Septembre 2014
Quand considère-t-on qu’une personne est « mentalement incapable » de prendre des décisions éclairées relatives aux actes de la vie quotidienne comme par exemple, gérer ses biens, ou consentir au traitement proposé, ou à l’admission dans un établissement de soins ou un EHPAD? C’est le cas si elle n’est pas apte à comprendre les renseignements pertinents ou à évaluer les conséquences qui pourraient découler d’une décision ou de l’absence de décision, c’est à dire de manière éclairée, consciente en comprenant la nature de l’acte et ses conséquences. Le déclin cognitif peut toucher différents domaines selon la maladie du sujet, les maladies neurologiques dégénératives évolutive à impact cognitif (MNDIC) recouvrant des maladies très différentes. Il conviendrait d’établir les règles éthiques régissant l’évaluation de la prise de décision, puis la prise de décision au nom d’une personne et enfin de son anticipation.
Reconnaître les capacités préservées
Quand on réalise un bilan clinique et neurocognitif, il est souhaitable de montrer en parallèle des capacités atteintes les capacités préservées, ce qui permet aux aidants de s’appuyer sur cette évaluation en encourageant la personne à s’en servir. Les aidants et la famille doivent laisser la personne prendre des décisions par elle-même et participer aux autres décisions tant qu’elle en est capable.
En effet la seule présence de troubles cognitifs ne permet pas de conclure à l’incapacité. Quand ces troubles sont légers, comme au début de la maladie d’Alzheimer, ils n’empêchent pas forcément de prendre des dispositions en connaissance de cause. Les troubles du comportement sont cependant aussi, bien sûr, à prendre en compte.
Il convient de s’adapter aux capacités changeantes : au fil de l’évolution de la maladie, les aidants et les soignants qui s’occupent de la personne malade doivent déterminer quelles capacités elle possède encore, décomposer les tâches et décisions complexes en options plus simples à comprendre, et respecter ses choix et une mesure de sauvegarde pour protection des incapables majeurs doit alors, si cela est nécessaire être soumise à l’expert au juge des tutelles.
La capacité est fonction de la complexité de la décision qui est à prendre. Plus une décision est complexe, et plus elle requiert des capacités cognitives importantes. Ainsi, une personne peut ne plus être capable d’effectuer un acte impliquant des dispositions compliquées (répartir ses biens entre plusieurs bénéficiaires), mais rester capable de prendre une disposition simple (comme léguer tous ses biens à son époux). De même, une personne peut ne plus être capable de prendre certaines décisions, mais rester capable de désigner quelqu’un (personne de confiance, mandataire de protection future) qui le fera pour elle, ou qui s’exprimera en son nom. En d’autres termes, il est important de vérifier les capacités décisionnelles non dans l’absolu mais pour une situation donnée, afin de préserver le respect des droits et libertés de la personne et le laisser prendre des décisions plus simples.
Il est important de planifier ce qui se passera lorsque la personne ne pourra plus prendre de décisions de façon autonome.
Si la personne a exprimé des désirs à ce sujet alors qu’elle était capable, nous devrions être tenus de respecter ces désirs, si possible. Ces désirs peuvent avoir été exprimés oralement ou par écrit. Les termes « directives anticipées » ou « testament de vie » sont souvent utilisés pour parler des désirs qu’une personne exprime alors qu’elle est capable.
S’il ne semble pas que de tels désirs aient été exprimés, la décision doit être prise dans l’intérêt véritable de la personne incapable. Pour déterminer ce qui constitue l’intérêt véritable, on devrait tenir compte des éléments suivants :
- les valeurs et les croyances que la personne avait lorsqu’elle était capable ;
- les désirs actuels de la personne, s’il est possible de les déterminer ;
- les effets bénéfiques prévus du traitement ou de l’admission ;
- l’importance des effets bénéfiques prévus par rapport aux risques ;
- la possibilité qu’il existe une solution moins contraignante ou moins perturbatrice.
Existe-t-il des circonstances dans lesquelles les désirs exprimés par la personne alors qu’elle était capable pourraient ne pas être respectés? S’il s’avérait impossible, compte tenu des circonstances, de respecter les désirs préalables exprimés par la personne alors qu’elle était capable, la ou le mandataire spécial n’est pas tenu de le faire.